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HISTOIRE DE LA TAPISSERIE
cet effet, avait fait planter un grand nombre de mûriers dans le parc du chàteau, afin de récolter sur place la soie destinée à la manufacture projetée, « et dès lors fut ordonné que les manufac­tures de toutes sortes de tapisserie, façon de Flandres, se feroient audit Moulins, et que les soyes provenant desdits mûriers seroient pour lesdites tapisseries, etc... Et depuis ladite dame, en 1582, mit les tapisseries à Orléans, ainsi qu'il sera dict à la.fin de ce traité. » S'il ne reste aucun renseignement de nature à nous éclai­rer sur l'issue de la tentative faite à Moulins, on sait du moins par une lettre de Catherine, datée de Fontainebleau, le 4 août 1582, et adressée aux maires et échevins d'Orléans, ville donnée à la reine douairière par ses enfants, qu'il existait alors dans cette ville une manufacture de tapisseries remplie d'ouvriers flamands, et que la reine s'occupait d'en augmenter le nombre.
Laffemas attribue aux guerres civiles la ruine de cet atelier, et il ajoute que son travail prit fin en 1585. Mais il a complètement ignoré l'existence d'une fabrique installée à Orléans trente ans avant que la ville entrât dans le douaire de la veuve de Henri IL
En 1557, un tapissier originaire de Bruges, nommé Pierre Gode­froy, regagnait son pays, après avoir travaillé quelque temps à Orléans, quand, s'étant arrêté dans une petite localité des Flandres, nommée Bailleul, il eut l'imprudence de tenir des propos favo­rables aux Français. A ce moment, c'était presque un crime de haute trahison. On rechercha le coupable sans pouvoir le trouver. Mais à sa place on arrêta un autre artisan qui, comme lui, venait de France, et avait aussi travaillé à Orléans sous la direction de son oncle. 11 se nommait Ferrand tiercelin, et l'oncle Pierre tiercelin. Une lettre adressée par Philippe d'Ongnyes, chargé de cette affaire, à Philibert Emmanuel, gouverneur général des Pays-Bas espa­gnols, nous apprend que Pierre tiercelin dirigeait la seule manufac­ture de tapisseries existant à Orléans; qu'il avait été s'y établir à la faveur de la trêve de Vaucelles, et qu'il avait sous ses ordres neuf ou dix ouvriers, les uns Flamands, les autres de Paris ou des provinces françaises. Quant à la date de la fondation de cet éta­blissement, il n'en est pas question. Il n'est pas dit non plus si la reine Catherine avait une part quelconque clans cette première installation de tapissiers à Orléans. Le fait serait assez vraisem­blable; .mais il ne reposerait, jusqu'à nouvel ordre, que sur de simples présomptions.